Mon premier Tabaski à l’étranger

10 novembre 2011

Mon premier Tabaski à l’étranger

On ne comprend l’importance d’être entouré par la famille que lorsque que  l’on se trouve dans le pétrin ou, comme dans mon cas, lorsque l’on célèbre une fête à des milliers de kilomètre de la famille. J’en ai eu une première impression lors de la Korité passée (Aïd el Fitr). Jamais une fête n’a été aussi fade ; pas parce que je l’ai passée seul, mais parce que j’étais loin des personnes que j’aime.

Jour j -2 Depuis quelques jours, la météo est capricieuse. Dehors il fait un froid de canard et en plus il y a beaucoup de vent. On en est encore aux prémices de l’hiver et il fait environ 16°. Je sais que 16° ce n’est pas une température aussi glaciale que cela ; mais aller demander à un Saloum-Saloum habitué aux températures supérieures à 25° s’il réussirait à s’adapter facilement à cette température. Je suis sûr que sa réponse sera négative. Et pour ne rien arranger, il pleut depuis deux jours. A casa, l’hiver s’accompagne de pluie ; donc mieux vaut s’adapter tout en prenant en compte que le pire reste à venir. De sortie en centre-ville, je suis pris au dépourvu par une pluie battante.

A moitié trempé et frigorifié, je décide de prendre un taxi rouge plutôt que d’attendre le bus qui refuse de pointer son nez. Sur le chemin, alors qu’on croise çà et là quelques petits troupeaux de moutons, le chauffeur, un homme fort sympathique me demanda dans un français assez approximatif mais quand même compréhensible : «  Vous avoir acheté mouton !? ». Un sourire s’échappa de mes lèvres ; pas parce que son parler me faisait rire, mais parce que c’est la première fois que l’on me posait cette question. Sacrifier un mouton le jour de l’Aïd à 23 ans cela me parait utopique !! Jusqu’à présent, je ne m’étais jamais imaginer le faire. Chez nous à moins d’être marié ou d’avoir un bon salaire, peu de jeune de mon âge respectent la tradition. Cette tâche revient toujours ou dans la plupart du temps aux pères de famille. Je répondis au monsieur que non, pour le moment on attend encore. D’ailleurs, je me demande comment il a fait pour savoir de quelle confession j’étais. Après tout je suis un étranger. C’est peut être parce que j’ai lâché un petit Alhamdoulilah (Par la grâce de Dieu) en rentrant dans son petit taxi rouge. Revenu de cette petite introspection, le chauffeur continue la discussion : « c’est le moment pour acheter ». En effet, depuis quelques jours il y a beaucoup de moutons dans la ville. Quand je lui ai demandé si les prix sont abordables, il répondit par l’affirmatif. Bien sûr il n’a pas oublié de mentionner que les prix varient selon la bourse du client et le mouton désiré. En pointant du doigt un mouton bien repu et plutôt gras, il me dit que celui là vous pouvez l’avoir à 2500 ou 3000 dirhams. J’imagine qu’il faudra marchander âprement avant d’avoir un beau spécimen. En parlant de moutons, ils sont nombreux dans la ville. Contrairement au Sénégal où les vendeurs se regroupent dans un grand espace appelé « daral », ici les bergers sont dispersés un peu partout à travers la ville. Il est possible de trouver plusieurs points de ventes séparés juste de quelques centaines de mètres. Nul besoin de faire un long déplacement. Parfois on en trouve même au pied de son immeuble.

Jour j -1 L’aïd tombe plutôt bien cette année. Ce sera au début du mois (le 7) ; ce qui veut dire que les salariés ont déjà perçu leur paye et qu’ils sont prêts à célébrer comme il se doit la fête. C’est-à-dire acheter un mouton et faire les dépenses à coté. En parlant de dépense, c’est le moment de faire les emplettes. Et pour ce, direction Marjane, le centre commercial le plus connu de tout Casa. Etendu sur une très grande surface, on trouve toute sorte de produits (électronique ménager  cosmétique et l’alimentaire). Cadis entre les mains, on circule à travers les différents rayons en prenant bien soin de ne pas tamponner le client d’en face lourdement chargé. Un petit arrêt s’impose au niveau d’un stand exposant des téléviseurs HD à écran plat. On admire pendant un moment ces joyaux technologiques dont les prix peuvent avoisiner les 13.000 drh. Je me suis tout de suite imaginer avec une console et une manette à la main. Mais trêve de rêveries, avec des prix aussi exorbitants, mieux vaut passer son chemin et s’occuper des choses plus importantes. Tabaski oblige, les cadis des différentes personnes  rencontrées sont chargés à bloc ; du coup il faut patienter quelques minutes avant de pouvoir enfin passer à la caisse.

Jour j Il fait encore froid ; plus froid que les jours passés. Il va falloir mettre le nez dehors car la journée commence par la prière à la mosquée. Ici, on prie une heure plutôt qu’au Sénégal. C’est à ce moment que l’on sort les boubous confectionnés spécialement pour l’occasion. A cet instant précis, je ne peux m’empêcher de me souvenir des Tabaski passés. Comme j’aimerais être chez moi en ce moment pour revivre et participer au balai multicolore des caftans. Découvrir par la même occasion les nouvelles coupes de nos maîtres tailleurs. De jolis modèles souvent copiés sur les stars de la chanson celles qui sont portées par les stars. Une foi à la mosquée, j’ai été très surpris de voir des personnes habillées de façon normale (pantalon jeans et chemise ou t-shirt). Scène impensable chez moi. Même si on est le plus grand chef d’entreprise, à l’heure de la prière, tout le monde s’habille en mode traditionnelle. Mais apparemment, ce n’est pas le cas ici.

Après la prière du matin vient l’instant T de la fête. Le sacrifice du mouton et son dépeçage. Si vous ne supportez pas la vue du sang, mieux vaut vous éloigner. Cette partie de la besogne  appartient aux hommes. Pendant ce temps, les femmes s’affairent à la cuisine. Qui dit fête, dit nourriture et dans notre cas, viandes à volontés. Les sérères n’ont qu’à bien se tenir 🙂

L’après midi et le soir est réservé aux visites de courtoisies que l’on fait au voisinage, à la famille, et aux amis proche. On profite de cette occasion pour souhaiter nos vœux. Pour cette fois ci, il n’y aura presque pas de déplacement ce sera sans doute pour l’année prochaine.

Jour j +1 Lendemain de fête, Casa ressemble à une ville abandonnée. Tout est étonnement calme. Les rues sont vides Rare sont les commerces ouverts ; même certaines boutiques du coin ont gardé leur store fermé. Les banques et autres sociétés sont toutes fermées. La circulation est d’une fluidité étonnante. Les embouteillages des jours précédents ont disparu. Les bus qui étaient autres fois pris d’assaut et remplis à bloc transportent à peine dix passagers. Casa a du mal à se réveiller et tourne au ralenti. Mais cette situation est temporaire. Dans quelques jours elle reprendra ses vieilles habitudes.

Finalement cette fête s’est bien passée. J’avais beaucoup d’appréhension à ce sujet car la dernière expérience n’était pas fameuse. Mais entre temps je me suis finalement adapté. Grâce à ma deuxième famille, j’ai passé un très bon Tabaski.  Plutôt cool comme première expérience non!!!!!

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