Un jour pas comme les autres

Article : Un jour pas comme les autres
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23 juin 2012

Un jour pas comme les autres

Les jours passent tellement vite que parfois, on a du mal à s’en rendre compte. Et pourtant, une année s’est déjà écoulé depuis que l’ex Président Wade ait tenté de se frayer un chemin pour le premier tour des élections présidentielles. Aujourd’hui les Sénégalais se souviennent de ce jour où ils ont décidé qu’il ne fallait plus être spectateur de ce qui se passe dans leur pays. Une prise de conscience qui leur a  permis de faire sortir Gorgui par la plus petite porte au second tour des élections. Retour sur une année pleine d’évènements qui a commencé non pas le 23 juin mais le 21.

Le 21 juin : Un député tente de s’enchaîner devant le portail de l’Assemblée nationale

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Cela faisait déjà plusieurs jours qu’on parlait du quart bloquant dans tous les médias de la place. Et pour cause, le Président Wade avait trouvé l’astuce qui lui permettait de remporter les élections, les doigt dans le nez, avec seulement 25% des suffrages. Comme on si attendait, les opposants ont tout de suite crié au voleur tandis que les partisans de Wade ont tenté d’expliquer l’inexplicable. Devant toute cette agitation médiatique, le ticket présidentiel allait quand même passé sous le vote des députés « du peuples ». Vous savez ces personnes dont on dit qu’elles ne savent faire que deux choses: applaudir et lever la main pour voter toutes les lois qu’on leur propose. C’est dire que ce ticket avait peu chance de ne pas passer. 

Mais ceux à quoi on s’attendait le moins, c’est que le Député Cheikh Bamba Dièye (maire de la ville de Saint-Louis et actuel Ministre de l’aménagement du territoire) allait se comporter d’une façon peu orthodoxe.

 

23 juin: Y’en a marre entre en action

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Il faut dire que contrairement aux autres, le mouvement Y’en a marre, constitué en majorité de rappeurs très engagés, avait pris comme défis de combattre le régime de Wade et ceci bien avant qu’il ait eu l’idée du quart bloquant. Il avait décidé de cibler principalement les jeunes en les incitant, dans leur différentes chansons, à aller s’inscrire massivement sur les listes électorales. Puis le mouvement s’est concrétisé et il ne s’agissait plus que de chansons mais de campagne de sensibilisations telles que le « Dass fananal, Ma carte mon arme » qui sillonnaient toutes les régions et qui dérangeaient au plus haut point l’Etat. Plus les jours passaient et plus le mouvement prenait de l’ampleur au point de faire de l’ombre à l’opposition. Mais Y’en a marre est définitivement rentré dans l’histoire lorsqu’ils ont interrompu le rassemblement de la société civile et de l’opposition pour leur faire comprendre que le temps n’était plus à la parole mais aux actes. S’en est suivi l’impressionnant rassemblement à la place Soweto juste en face de l’assemblée nationale. Histoire de rappeler aux députés qu’ils sont là avant tout pour servir le peuple et non les intérêts d’une tierce personne.

27 juin: Dakar s’embrase

Après la défaite cuisante du 23 juin et le retrait du ticket du quart bloquant, le régime de Wade doit faire face à une nouvelle crise qui a pris des proportions très inquiétantes. En effet des émeutes ont éclaté dans différents endroits de la capitale et dans certaines régions du pays. Les émeutiers s’en sont pris aux locaux de la SENELEC et malheureusement à certains bâtiments publics. Marre des coupures intempestives qui peuvent durer une demi journée voire plus et des factures qui elles, sont de plus en plus salées, les population ont décidé de manifester leur mécontentement par la plus violente des manières. Mais ce qui a le plus embêté l’Etat dans toute cette histoire, c’est le coup de fil que Karim Wade aurait donné à un certain Robert Bourgi pour demander l’intervention de l’armée française. Chose immédiatement démentie dès sa publication dans les médias. Déjà que Karim Wade n’avait pas trop la côte chez le sénégalais lambda, sa situation n’allait guère s’améliorer avec ce qui allait devenir l’affaire Bourgi.

22 décembre: Le Far West s’invite dans la précampagne

Cela faisait déjà plusieurs jours que le discours politique s’était un peu radicalisé. Mais ce qui allait se passer le 22 décembre, personne ne pouvait le prédire. Cet après-midi là, Sénégalais vont assister à une scène digne d’un film d’action.

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Jusqu’où nous mèneront-ils? Voilà la question qui me préoccupait, tellement j’avais l’impression de vivre dans un autre pays. La tension était déjà très électrique mais des gens sans foi ni loi avaient décidé d’en rajouter en allant attaquer physiquement le camp d’en face. Résultat un mort et un blessé et toute une population plongée dans la stupeur des violences électorales.

27 janvier 2012: Le candidat de trop

Pendant plusieurs mois, les Sénégalais étaient tenu en haleine quand à la validation ou non de la candidature de Wade par le Conseil constitutionnel. Plusieurs débats ont même été organisés à ce sujet, d’imminents professeurs en droit constitutionnel ont donné leur avis. La majorité était contre mais biensûr il faut toujours qu’il y’en ait un petit groupe pour faire l’avocat du diable. Mais au final personne n’était dupe. Avant même la publication des listes, tout le monde savait que Wade ferait parti des candidats. Mais les gens avaient aussi conscience du danger que cette nouvelle représentait. D’un jour à l’autre, ce petit pays autrefois très paisible est devenu le centre de toutes les attentions; certains n’attendant qu’une chose, une implosion et de ce faite, une nouvelle crise sanglante à ajouter dans le tableau déjà très sombre du continent.

Malheureusement, les gens avaient raison de craindre la décision du Conseil constitutionnel car dès l’annonce des listes définitives, le sang a coulé. Dès la nuit, on dénombre déjà un mort dans les rangs des forces de l’ordre. La vidéo a très rapidement circulé sur facebook et youtube avant d’être respectivement supprimée sur les deux plateformes. Un climat de stupeur s’empare de tout le pays, des rumeurs plus inquiétantes les unes que les autres circulent sur les réseaux sociaux. Les jours suivants les manifestations du M-23 s’intensifient et malheureusement le décompte macabre aussi. La répression policière fait des victimes et les images circulent en boucle dans les différentes  chaînes du pays sauf sur la RTS. Au final une dizaine de morts, des nombreux blessés et plusieurs arrestations ont émaillé toute la durée de cette campagne électorale où la violence a fait plus parlé d’elle que le programme des différents candidats.

26 février: Le jour-j

Après une campagne émaillée de violence, il est temps pour le peuple d’aller décider de son futur.Là encore il y a une grande crainte concernant le bon déroulement du scrutin vu que les jours précédents, des rumeurs de fraudes massives ont circulé dans la presse. Mais cela n’a pas empêché les sénégalais d’aller voter  en masse et contre toute attente dans la paix. Aucune perturbation majeure n’a été signalée à part celle que tout le monde a pu découvrir sur le net et qui a fait un buzz incroyable:

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Plus tard dans la soirée, deux candidats ont fait la différence et la probabilité qu’il y ait un second tour est plus que grande. Seulement un candidat a en surpris plus d’un; il s’agit de Macky Sall. L’ancien Prémier Ministre et ex PDS, qui en  était à sa première tentative est tout simplement arrivé  devant les ténors de l’opposition comme Abdoulaye Niasse du AFP et Tanor Dieng du PS qui pourtant étaient donnés comme les principaux challengers du président sortant. L’histoire est sur le point d’ouvrir une nouvelle page.

25 mars: Une nouvelle page s’ouvre

Il n’a pas fallu attendre longtemps pour que les gens se rendent à l’évidence de la victoire écrasante de Macky Sall et ses alliés devant Abdoulaye Wade. Scotché devant la télé on guettait une par une les résultats des différents bureaux de vote. Et à chaque fois, les votes pour Macky Sall représentaient le triple voire même plus que ceux en faveur de Wade. Au bout de deux heures de dépouillement on savait déjà que les carottes étaient cuite pour Wade et compagnie et d’ailleurs il ne pas fallu longtemps pour qu’il reconnaisse lui même sa défaite. Son coup de fil au vainqueur a vite fait le tour des médias et enfin, les populations ont pu laisser éclater leur joie dans les rues de la capitale et enfin célébrer leur victoire. Oui il s’agit bien d’une victoire car à quelques jours du second tour, des « Ndiguel » (consignes venant d’un guide religieux) avaient été donné par personnes ayant une certaines influence. Mais les Sénégalais en avaient décidé autrement et ont donc choisi avec une majorité écrasante d’élire Macky Sall comme le quatrième Président de la République

En une année, le Sénégal est passé par tous les stades pour accomplir une nouvelle alternance. Aujourd’hui plus que jamais, beaucoup de sénégalais se disent être des NTS (Nouveaux Types de Sénégalais, concept crée par les membres du mouvement Y’en a marre) les citoyens se sentent très impliqués dans la façon dont est gérée leur pays. Désormais il n’est plus question de laisser perdurer l’impunité comme ce fut le cas dans l’ancien régime. D’ailleurs la « chasse aux sorcières » a déjà commencé et de plus en plus, on entend parler d’enrichissement illicites et de poursuites judiciaires visant les anciens dignitaires du régime de Wade. Le peuple a soif de justice et Macky Sall et son gouvernement sont les mieux placés pour savoir qu’ils n’ont pas le droit à l’erreur.

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Commentaires

amadou w balde
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je trouve que c'est une page de l'histoire du sénégal à conserver jalousement, car c'est la victoire du peuple et de la démocratie. encore une fois félicitation pour tous tes textes.

Ameth DIA
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Merci pour les compliments. j'espère revenir très vite avec d'autres post

amadou w balde
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très intéressant mon frère. un travail vraiment à saluer, bonne continuation.